Depuis son premier album 'Music For Tourists' en 2007 - qui m'avait procuré quelques frissons et beaucoup d'émoi (ou l'inverse), je ne crois pas avoir écouté d'autres disques de Chris Garneau. A peine ai-je du jeter une oreille sur 'El Radio' en 2009. Tout juste ai-je souvenir qu'il a du venir jouer à Lyon il y a quelques années. Mais à part ça ? Rien. Totalement perdu de vue.
Alors que je retombe sur lui au hasard des playlists mensuelles du toujours très à la pointe de l'actualité Ben Laredo, j'apprends que Chris Garneau a eu une carrière très erratique, à la discographie chiche (trois albums et un Ep seulement depuis 2009), qu'il a composé quelques pièces de musique pour des spectacles de danse et, plus improbable, qu'il a notamment fait une pause de deux ans pour aller vivre dans une ferme et élever des animaux au début des années 2010.
Retomber sur lui est donc une surprise. Et une surprise de taille tant son nouveau single Goldmine (en écoute aujourd'hui), est une franche réussite. Une sorte de blues synthétique, faussement léthargique, étouffant de prime abord, avec une voix qui semble se balader d'écho en écho, un phrasé piqué, et un trio guitare/basse/batterie presque intermittent mais aux éclats savoureux qui donnent du corps à la mélodie au fur et à mesure de l'avancée du morceau. Magnétique.
The Serfs est un de ces groupes à-part. Du genre sans compromission, qui trace sa voie de post-punk perturbé, de synth-wave plus que pop avec ce soupçon d'indus sans se retourner, toujours sûr de lui, avec une ligne directrice dont il ne démord pas. Comme s'il se fichait du succès et n'entendait rien d'autre que sa vision, qu'elle plaise ou non.
Après trois albums (le dernier, 'Half Eaten by Dogs', date de 2023), le trio de Cincinnati revient petit à petit aux affaires : un 45-tours pour Trouble In Mind Records à l'automne dernier et un nouveau single le 26 mars dernier, Bodies in Water (en écoute aujourd'hui). Une chanson synthétique à la voix pleine d'écho, presque indolente mais à l'efficacité hypnotique, genre de New Order sous tranxène, à la mélodie et aux waves dansantes autant que langoureuses et nébuleuses, et toujours un rien désespérés (« Born with two hearts. One for destruction, and one just to stay alive »).
J'ai tout fouillé. Tout. J'ai passé ma collection de disques en revue. Deux fois. J'ai fouillé les archives de ce blog de fond en comble. J'ai lu toutes les chroniques à leur propos que j'ai pu trouver. J'ai demandé à des amis. J'ai ressorti ma vieille collection de CD mp3 qui traine au fond d'un placard et qui n'avait pas vu le jour depuis sans doute une décennie. J'ai même demandé (première fois pour moi) à Chat GPT. Et... rien. Nada. Que tchi. J'ai beau écouter, réécouter, et reréécouter depuis quinze jours Life Is A Movie, la chanson qui ouvre 'Surgery and Pleasure' de Vundabar, je n'arrive pas à mettre l'oreille sur le groupe auquel ce trio américain me fait penser - et pas qu'un peu.
Pourtant, il y a tout dans ce morceau qui devrait sonner comme une évidence : la production comme granuleuse, ces guitares nerveuses et leur façon de sonner, ce chant et surtout ce refrain (ce foutu refrain même !). Mais non, toujours rien. Et le reste de l'album, dans la lignée de cette chanson d'ouverture, ne m'a pas plus aidé. On a beau y entendre du Interpol, du Against Me, du Editors, un rien de Pavement (la longue balade I Need You), de Franz Ferdinand aussi (ce côté dansant qui ressort ici et là) et plus globalement toute une flopée de groupes des années 2000 (et sans doute même plutôt dans sa deuxième moitié), rien n'y fait et surtout, rien de quoi me convaincre totalement. Non, la vérité est ailleurs semble-t-il, mais où ? La question est là.
Vous me direz, est-ce vraiment crucial ? Pour ma santé mentale, sans doute, oui. Mais en vérité, non, Life Is A Movie (en écoute aujourd'hui) étant une sacrée bonne chanson, qui ouvre qui plus est un bel album, plus anglais qu'on pourrait le croire, et qui, s'il ne réinvente pas la roue vous l'aurez compris, le fait bien. Surtout, un morceau qui se suffit à lui-même, aguicheur, riffeur, nerveux et sacrément bien tourné. Mais tout de même, si quelqu'un a une idée, l'illumination ou ne serait-ce qu'un bout de piste, je suis preneur : je suis sur le point de devenir fou.
Album : Surgery and Pleasure Année : 2025 Label : Loma Vista
Sur la pochette du deuxième album de The Tubs, on peut trouver une sorte d'oxymore photographique : à l'avant, une femme donne le sein à un bébé. Au second plan, une pierre tombale. Elle, c'est Charlotte Greig, artiste éclectique autant que journaliste musicale. Le bébé, c'est Owen Williams, ex-chanteur de Joanna Gruesome et désormais au micro de The Tubs, qui vient donc de publier le successeur du remarqué (et tout aussi remarquable) 'Dead Meat' en 2023, 'Cotton Crown'.
Un disque qui ne transpire pas de bonheur (et alors même que Charlotte Greig n'est que clairement évoqué sur Strange, la chanson de clôture), où il est question de relations amoureuses qui tournent à vide, de dénigrement de soi, d'interactions sociales compliquées, d'ennui et de lassitude à peine voilés. Pourtant, musicalement, si la mélancolie est bien présente, il y a dans cette jangle-pop énervée (aux accents parfois punk) et qu'on pourrait situer quelque-part au croisement des Smiths (cette guitare !) et de R.E.M., assez de peps et d'envie d'en découdre pour vouloir croquer la vie à pleine dent.
Court et fort de quelques singles à l'efficacité impeccable (l'évident Freak Mode mais surtout One More Day, en écoute aujourd'hui, chanson à l'intro, aux riffs et à l'urgence imparables), 'Cotton Crown' est donc un album curieux, qui joue de l'ombre et de la lumière à tous les niveaux ; et qui prouve (mais qui en doutait ?) que 'Dead Meat' n'était pas qu'un one-shot réussi. The Tubs devraient être dans les parages encore pour un moment.
Album : Cotton Crown Année : 2025 Label : Trouble In Mind Records
L'an passé, parmi les nombreux disques que j'aurais voulu évoquer se trouvait 'Box for Buddy, Box for Star' de This Is Lorelei, le moniker d'un certain Nate Amos, qui après dix ans à publier des disques - semble-t-il - sans queue ni tête et plein d'expérimentations diverses, s'était enfin résolu à sortir un vrai premier album.
La sortie d'une Deluxe Edition est une bonne occasion d'évoquer ce disque plein de bonnes (et même très bonnes) chansons mais dont l'unité suspecte (voire carrément absente, notre homme partant un peu dans tous les sens) gâchait un peu tout.
Plutôt que d'ajouter des face-B ou des morceaux écartés au dernier moment comme le veut la tradition de ces nouvelles éditions, This Is Lorelei a préféré demander à trois artistes de reprendre trois chansons de 'Box for Buddy, Box for Star'. Ainsi, à Bob and Sarah Amos la chanson d'ouverture Angel's Eye, à Snail Mail Two Legs, et à MJ Lenderman la reprise de Dancing in the Club, sans doute le tube du disque (en écoute aujourd'hui).
L'américain, auteur l'an passé d'un bon album mais surtout d'une chanson immense, She's Leaving You (une de mes préférées de 2024) s'y colle en ralentissant le tempo de la version originale, en évacuant toute sa vibe synth-pop, en ne cachant pas sa voix derrière des effets et en faisant ce qu'il fait de mieux : chanter la mélancolie sur de belles guitares et
une ambiance toute nineties et qu'il a fait sienne. Une reprise
absolument superbe et un très beau contrepoint à la très belle version initiale de This Is Lorelei.
Album : Box for Buddy, Box for Star (Deluxe Edition) Année : 2025 Label : Double Double Whammy
En plus des playlists Spotify, Deezer, Tidal et YouTube, Dancing in the Club de This is Lorelei repris par MJ Lenderman est également en écoute ci-dessous :
Autant faire les choses bien en écoutant la version originale de Dancing in the Club par This is Lorelei donc :